Joueurs français


Stéphane Dalmat

Je suis la Berrichonne de Châteauroux depuis tout petit, et j'ai vu beaucoup de très bons joueurs y passer : Patrick M'Boma, Yann Lachuer, Ferdinand Coly, entre autres. Mais en 1997, lorsque Stéphane Dalmat a été lancé dans le grand bain de la D1 avec la Berrichonne, je n'avais jamais vu un joueur aussi précoce, ausi talentueux balle au pied, dégageant une telle facilité et une telle classe. J'ai vu de mes propres yeux ce joueur controversé émerger au plus haut niveau, j'ai suivi de très près la suite de sa carrière, et j'estime donc être assez bien placé pour parler de ce joueur et juger de sa qualité.

Châteauroux : Selon la légende, Stéphane Dalmat, alors joueur de Joué-les-Tours, a été engagé par Châteauroux sur une simple lettre de candidature, alors qu'une multitude de clubs pros lui proposaient d'essayer ailleurs. Après quelques mois dans une équipe réserve trop petite pour lui, c'est tout naturellement qu'à 18 ans Victor Zvunka le fait débuter en D1, à Auxerre je crois (défaite 0-5). Au fil des matches, une évidence va apparaître : Dalmat a un talent fou. Il multiplie les accélérations fulgurantes, les doubles contacts, les roulettes, du jamais vu dans un modeste club comme le nôtre. Certes, il est très immature dans son jeu, commet beaucoup d'erreurs, et disparait parfois d'un match qu'il avait bien entamé. Mais la qualité et surtout les promesses d'un grand avenir sont là, et elles n'échappent pas aux grands clubs français comme européens, qui se bousculent en fin de saison pour débaucher la perle rare. C'est finalement Lens qui remporte le jackpot, avec une mise de 32 millions de francs. La Berri n'a pu refuser une telle offre, même modeste pour un joueur d'un tel calibre, puisqu'il faut rappeler que l'année où Châteauroux est monté en D1, son budget était de 21 millions de francs.

Lens : A Lens, Stéphane réalisera une saison moyenne. Après un match d'avant-saison phénoménal contre le PSG, son talent n'apparaît que par bribes éparses. Quelques belles prouesses techniques, quelques démonstrations de puisance impressionnantes, mais une année globalement en demi-teinte, dans un contexte pourtant assez favorable. Mais si Dalmat est assez irrégulier dans ses performances, jouer dans un club médiatique et participer à la prestigieuse ligue des champions lui offre une formidable vitrine. Son énorme potentiel ne passe pas inaperçu, et son nom est connu de toute l'Europe du football. A la mi-saison, la rumeur dit que le Milan A.C. aurait proposé près de 150 millions de francs pour s'attacher ses services. Dalmat restera finalement à Lens, mais pas pour longtemps, puisqu'après avoir fini la saison en roue libre, il sera cédé à l'Olympique de Marseille pour un montant estimé à 80 millions de francs.

Marseille : A Marseille, le contexte est explosif. Avec un effectif pourtant impressionnant (Ravanelli, Dugarry, Pires, Luccin,...), L'O.M. déçoit et le public gronde. Dans ce contexte difficile, Stéphane va comme l'année précédente effectuer une saison moyenne. Si le talent semble intact, il lui arrive fréquemment de passer au travers, comme la plupart de ses prestigieux coéquipiers d'ailleurs. L'O.M. n'était sans doute pas un club fait pour lui. Preuve de ses performances assez passables, sa revente au PSG ne coûtera qu'environ 70 millions de francs au club parisien.

Paris : Dalmat arrive donc au PSG dans un contexte a priori excellent pour lui, entouré de jeunes joueurs comme Luccin ou Anelka. Son entame de saison est exceptionnelle : il exprime dans ses premiers mois à Paris tout son potentiel technique et physique, et justifie enfin tous les espoirs placés en lui. Régalant le public du parc de ses roulettes et de ses accélérations félines, Dalmat semble enfin épanoui et sur les rails d'une carrière qu'on lui annonçait radieuse. Seulement comme à Marseille, il semble que ce soit le contexte général qui ait stoppé le joueur dans son élan. Malgré son effectif princier, Paris enchaîne les défaites, et la crise ressurgit. Dalmat est alors moins performant que pendant les premiers mois de la saison où le PSG tournait à plein régime. Comme les autres jeunes joueurs, il polarise des critiques excessives. Le PSG est connu pour ses choix toujours judicieux de recrutement et de gestion d'effectif, et il ne va pas faillir à sa réputation : après 4 mois de performances de grande qualité, puis deux mois en demi-teinte, Dalmat est jeté comme un malpropre et part à l'Inter de Milan en échange de Vampeta, aujourd'hui retourné au Brésil après un passage mémorable à Paris. Le PSG croit réaliser une bonne affaire, mais c'est l'Inter qui va la réaliser.

Milan : Lorsqu'il arrive à l'Inter, Stéphane doit faire face à une concurrence redoutable au milieu de terrain, rien à voir avec Edouard Cissé ou Pierre Ducrocq au PSG. Mais en Italie, tout le monde a sa chance, d'où que l'on vienne, mais surtout là-bas, on connait le football, et on sait reconnaître le talent, même évident. Dès les premiers entraînements, Dalmat retrouve toutes ses sensations, sa facilité technique, son aisance balle au pied. Il impresionne. Après un premier match où il joue un quart d'heure, Dalmat est propulsé titulaire pour le restant des matches de la saison, relèguant un très grand joueur sur le banc, Clarence Seedorf en l'occurence. Les défauts des débuts semblent totalement oubliés : Stéphane apparaît désormais en totale confiance, d'une activité régulière sur un match comme au cours d'une saison. Et surtout son jeu est plus épuré : moins de roulettes (certes magnfiques) superflues pour épater la galerie, des ballons propores et secs, et beaucoup moins de déchets. Mais le talent reste toujours évident : le brio technique, la puissance, la vitesse sont intacts. Presque logiquement, dans un club qui regorge pourtant de stars, Stéphane est élu par les tifosi meilleur joueur de l'Inter de la saison. Il peut remercier Paris, qui en le vendant a finalement totalement relancé sa carrière.

L'avenir : Malgré cela, et en attendant on l'espère des titres et des sélections en équipe de France, Stéphane Dalmat aura toujours ses détracteurs. On lui reproche, pelle-mêle, de n'avoir rien prouvé, de ne pas justifier par ses performances ses transferts luxueux, d'avoir une mentalité disons... nonchalante, d'être irrégulier, etc... En France, il existe un sport national qui consiste à brûler les joueurs jeunes et prometteurs, certes parfois un peu trop sûrs de leur talent, lorsqu'ils ne rentrent pas totalement dans le moule, où qu'ils font preuve de désinvolture. Nicolas Anelka, mailleur attaquant de la planète quand il était à Arsenal, est à l'heure où j'écris scandaleusement sifflé sur tous les terrain de France, et Peter Luccin, un temps envisagé pour prendre la succession au poste de libéro en équipe France, a été jeté lui aussi par le PSG à l'intersaison et va être oublié pendant une saison au Celta Vigo, où il réussit de belles performances par ailleurs. Lorsque le talent est trop évident et que le joueur agace, il faut vendre du papier et salir le joueur, plutôt que d'accepter sa personnalité. Christophe Dugarry semble s'être remarquablement remis de tout ce cirque. Espérons que les deux joueurs précédemment nommés suivront le même chemin. En tous cas, Stéphane Dalmat semble se porter comme un charme, loin de la presse française et de ses mesquineries.

Pour finir, je voudrais simplement dire que Stéphane Dalmat doit impérativement et dans les plus brefs délais intégrer l'équipe de France. C'est une telle évidence pour moi que je ne devrais pas l'écrire, mais cela ne semble pas être le cas pour tout le monde. J'écris ces lignes le lendemain d'un match de l'équipe de France espoirs où Dalmat est resté du début à la fin du match sur le banc, de manière assez incompréhensible. Malgré cela, Roger Lemerre doit l'apeler pour participer à coupe du monde 2002. Micoud en rupture avec son club, Djorkaeff vieillissant, la place est grande ouverte pour un milieu offensif de sa trempe. Dalmat est une combinaison exceptionnelle de finesse technique et d'explosivité physique, comme on en a rarement eu en équipe de France. C'est l'un des joueurs les plus spectaculaires qu'il m'ait été donné de voir jouer. C'est ce que ceux qui ne l'apprécient pas lui reprochent : par moments éblouissant, mais manquant d'efficacité et de combativité. Tout cela est faux. S'il confirme sa fin de saison à l'Inter, et s'il gravit sa marge de progression encore énorme, et s'il continue avec le même état d'esprit, Stéphane Dalmat sera indispensable, et deviendra tout simplement l'un des meilleurs joueurs au monde.



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